Julien, comment es-tu devenu masseur pour chevaux ?
J’ai découvert cette pratique assez jeune, vers l’âge de 18 ans. Largement développé aux États-Unis, le massage équin était méconnu en Belgique et, je pense, rarement utilisé en Europe. J’ai toujours été attiré par le sport de haut niveau. N’ayant pas les moyens d’être cavalier, j’ai cherché à vivre de cette passion en apportant quelque chose de neuf au monde équestre.
A 38 ans, après plus de 10 ans d'expérience, je peux affirmer que les cracks chevaux qui brillent au firmament des épreuves internationales comme tous ceux qui, anonymes mais courageux, foulent les terrains de concours, ont tout à gagner à être régulièrement massés.
Cependant, je ne suis pas magicien. Mon métier s’inscrit dans le suivi global du cheval. Je fais partie d’une équipe composée de vétérinaire, nutritionniste, ostéopathe, dentiste… Qu’importe la discipline ou le niveau. Dès lors qu’on exige de lui un effort, le cheval doit être considéré comme un sportif et à ce titre, être entouré d’une équipe qui veille à sa santé.
Je suis devenu masseur équin car je crois que la performance, chez le cheval comme chez l’homme, réside dans la quête d’un bien-être global qui permet au génie de s’exprimer. Comme dit l’adage, « un esprit sain dans un corps sain ».
Quels sont les bénéfices du massage pour le cheval ?
D’abord, laissez-moi vous expliquer. L’ostéopathie agit sur la structure musculo-squelettique du cheval. Le massage vise les masses musculaires pour dénouer les tensions, assouplir et détoxifier. Les deux pratiques sont complémentaires.
En revanche, l’image circule à tort d’une pratique douce, peu invasive. Et c’est faux. Pour libérer une tension, je dois parfois masser en profondeur. Avez-vous déjà demandé à votre kiné de relâcher une tension ? Que retenez-vous d’une séance de stretching après un effort ? C’est douloureux. Nous, les humains, nous savons que c’est pour notre bien. Le cheval, lui, apprend à posteriori que le massage va le soulager. C’est pourquoi, certains individus ont besoin de 3 à 4 séances progressives pour accepter la manipulation.
Libérer une tension revient à soulager un écheveau des compensations qui se sont tissées autour de la contraction. C’est dire l’intérêt d’un suivi régulier pour les chevaux de sport.
Justement, peux-tu nous parler de ton travail auprès des chevaux de haut niveau ?
Dans les écuries de saut d’obstacle où j’assure un suivi rapproché des athlètes, on s’est aperçu que le recours à l’ostéopathe est moins fréquent. Le cheval dispose mieux de son potentiel au quotidien, compense moins et se blesse moins.
Gregory Wathelet est partenaire de Cavasso. Je vais donc le citer en exemple.
Les chevaux de son écurie passent entre mes mains, en moyenne, deux fois par mois, selon le planning sportif. Ainsi, je les vois avant et après les épreuves, en préparation et en récupération. C’est très gratifiant de suivre des cracks sur le long terme. Nous finissons par bien nous connaitre. Mes mains savent rapidement trouver une zone éprouvée et le cheval, confiant, se laisser aller. Dès lors qu’ils ont l’expérience du relâchement, les chevaux contribuent au soin.
Il m’arrive de les accompagner sur les grosses échéances où les épreuves s’enchainent pendant plusieurs jours. Avant l’effort, je masse pour réveiller les muscles, les stimuler et les échauffer. En outre, le massage est déstressant, un bénéfice bien utile en concours. Au retour de l’épreuve, je libère les tensions, j’assouplis et je détoxifie.
Il n’est pas rare qu’à cette occasion, d’autres écuries fassent appel à mes services. J’ai massé des célébrités de tous poils et de tous horizons dans les écuries belges, allemandes, américaines, suisses, norvégiennes… Près d’un tiers des cavaliers du Top 100 mondial ont déjà fait appel à mes compétences. J’ai soigné les meilleurs chevaux de la planète. 17 d’entre eux m’ont offert des médailles au niveau olympique et mondial. C’est pour moi une grande fierté d’avoir, d’une part, contribué à leur bien-être et d’autre part, démontré l’efficience de mon métier.
Je crois que la performance, chez le cheval comme chez l’homme, réside dans la quête d’un bien-être global qui permet au génie de s’exprimer.
Utilises-tu d’autres techniques en complément des soins manuels ?
Au fil du temps, j’ai développé une méthode à la croisée des chemins entre massage, stretching et manipulations passives pour favoriser la vitalité et un assouplissement global. Ça ne me semblait pas suffisant pour les chevaux de haut niveau qui sont sujets aux blessures et potentiellement, développent de l’arthrose.
Formé en physiothérapie, je combine l’électrostimulation à la chaleur ou au froid, selon le cas. L’éventail des soins à ma disposition aide grandement pour apporter du confort et, dans le cas de blessure, accélérer la cicatrisation.
Convaincu des bienfaits des cures thermales, à titre personnel, j’ai longtemps cherché une solution pour adapter le principe aux chevaux… avant de croiser la route de Chloé. Depuis, je complète les protocoles de soin avec des enveloppements aux algues. Les effets sont immédiats, c’est assez bluffant. Les cavaliers me partagent souvent leur plaisir de trouver leur cheval aussi disponible au retour du concours qu’à la veille du départ. Je les mets d’ailleurs en garde contre les débordements d’énergie que j’ai parfois constatés chez les jeunes chevaux.
Les produits de la mer ont un effet puissant sur la physiologie du cheval. Ils ne remplacent pas les manipulations mais renforcent singulièrement l’action de détoxification et de stimulation musculaire.
Un dernier mot ?
J’aimerais que l’exemple des chevaux de haut niveau inspire davantage les amateurs de sport équestre. Masser les chevaux n’est pas réservé à une élite. Le tarif est abordable et les bénéfices, réels en matière de santé et de performance. J’aimerais que la pratique se développe et qu’un plus grand nombre puisse en bénéficier, chevaux de sport, de loisir ou retraités.
Merci Julien, pour ce partage et pour ta bienveillance envers les chevaux de sport.
Julien Adam, Equine Sports Care
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